DELAUNAY Ernest, Joseph, Marie, Gabriel
né le 20 août 1907 à Ploubaznalec (Côtes-du-Nord ; Côtes d'Armor, demeurant à La Clarté en Perros-Guirec, marié à Marie TILLY avec laquelle il eut 2 enfants (4 ans et 10 ans), directeur de la coopérative de bâtiment "La Perrosienne", membre du réseau Notre Dame de Castille, arrêté le 22 mai 1942 à son domicile par les feldgendarmes, incarcéré à la maison d'arrêt de Saint-Brieuc, d'Angers (Maine-et-Loir), puis à celle de Fresnes (Seine ; Hauts-de-Seine), déporté au camp de concentration de Natzweiller (Bas-Rhin), puis le 4 septembre 1944 à celui de Dachau en Allemagne, rescapé des camps de la mort.
DANS LE RESEAU DE RENSEIGNEMENT
NOTRE-DAME-DE-CASTILLE
En 1936, j'était employé dans l'entreprise de bâtiments TILLY à La Clarté en Perros-Guirec.
Après l'arrivée du Front Populaire suivi des réformes sociales (congés payés, 40 heures hebdomadaires…) il y eu des mouvements de grèves, considéré comme un des responsables syndicaux je fus licencié.
Avec un des secrétaires de l'entreprise TILLY, un nommé POULIGUEN, nous avons constitué la coopérative ouvrière " La Perrosienne ", quelques contremaîtres et ouvriers de l'entreprise TILLY son venus grossir le groupe, l'entreprise a démarré ses activités avec treize associés tous très motivés.
Après la débâcle de 1940 tous les associés de " La Perrosienne " étaient prisonniers excepté un chauffeur et moi-même étant le directeur de la coopérative.
J'ai été arrêté le 22 mai 1942 et me suis évadé du kommando de Dachau fin avril 1945.
Au moment de la débâcle de 1940 les officiers de l'école de pilotage n°17 d'Evreux repliée à Servel ont requis deux camions avec deux chauffeurs, moi et un chauffeur de La Clarté Monsieur HILLION qui tenait un café. Nous sommes partis en direction de la Dordogne, avec des collègues nous avons organisé un convoi pour revenir dans le secteur au mois de septembre 1940.
A mon retour j'ai été contacté par un entrepreneur de Lannion Monsieur Jean KERAMBRUN accompagné d'un Allemand qui venaient me réquisitionner pour travailler au camp de Servel pour le compte de la Luftwafe. Ils voulaient deux cents hommes pour le lendemain, je leur ai dit :
" mes hommes sont prisonniers de guerre, vous n'avez qu'à les libérer, comme cela vous aurez de la main d'œuvre "
Il me fut répondu :
" de toute façon vous êtes rentré avec un autre véhicule, on vous réquisitionne pour demain matin au camp de Servel ".
Nous avons travaillé avec les deux camions au terrassement du camp d'aviation.
Un commandant en retraite du nom de COBAN de Perros-Guirec, qui était aux Messageries Maritimes a su que je travaillais au terrain d'aviation, au mois d'octobre 1940 il m'a demandé si je pouvais lui remplir un formulaire avec des renseignements sur l'emplacement des baraquements et la nature des équipements allemands sur le terrain (avions, marques des avions…).
J'acceptais, mais je lui ai dit :
- " c'est très prématuré votre histoire, je veux bien vous rendre service, mais je veux conserver l'arrangement ".
J'ai transmis les formulaires et compte rendus que j'ai porté dans sa villa de Perros-Guirec (l'ancienne villa de Robert COULOMBEAU président du syndicat d'initiative).
Je lui ai donc fourni des plans et des renseignements sur les avions.
Un jour il m'a présenté sa nièce Mademoiselle BALAN de Langoat à côté de La Roche-Derrien. Elle faisait à Rennes des études de philosophie avec une demoiselle WILTBORTS de l'Ile-de-Bréhat. La mère de Mademoiselle WILTBORTS était en contact avec les anglais par un réseau.
Nous avons continué à donner des renseignements qui partaient directement de Bréhat par Madame WILTBORTS. Elle avait pris contact pour la première fois grâce à un français d'Afrique du Nord qui était en permission et a qui elle avait remis un message pour LARDRER caché dans un canard en peluche.
J'ai continué à prendre des photos et à donner des renseignements.
Le 2 mai 1942 nous avons entendu un message à Radio Londres :
- " SIDONIE est malade, si vous la contactez vous serez contaminé ", cela voulait dire qu'elle était grillée (SIDONIE alias Madame WILBORTS).
J'ai pris mon vélo pour rejoindre mon agent de liaison qui était à Tréguier, Mademoiselle LABBE, et je lui ai dit que SIDONIE était grillée et que nous allions tous nous faire arrêter.
J'avais une autre liaison à Paimpol avec Madame LERMEUR qui tenait un magasin, elle m'a dit :
- " non SIDONIE est partie à Paris pour chercher une autre liaison car on a refusé de lui donner la notre ".
ARRESTATION LE 22 MAI 1942
A PLOUMILLIAU
Nous avons continué à donner des renseignements qui partaient directement de Bréhat par Madame WILTBORTS. Elle avait pris contact pour la première fois grâce à un français d'Afrique du Nord qui était en permission et a qui elle avait remis un message pour LARDRER caché dans un canard en peluche.
J'ai continué à prendre des photos et à donner des renseignements.
Le 2 mai 1942 nous avons entendu un message à Radio Londres :
- " SIDONIE est malade, si vous la contactez vous serez contaminé ", cela voulait dire qu'elle était grillée (SIDONIE alias Madame WILBORTS).
J'ai pris mon vélo pour rejoindre mon agent de liaison qui était à Tréguier, Mademoiselle LABBE, et je lui ai dit que SIDONIE était grillée et que nous allions tous nous faire arrêter.
J'avais une autre liaison à Paimpol avec Madame LERMEUR qui tenait un magasin, elle m'a dit :
- " non SIDONIE est partie à Paris pour chercher une autre liaison car on a refusé de lui donner la notre ".
Elle est tombée sur des agents doubles qui ont travaillé avec nous dans le réseau, et nous avons été arrêté à quatorze dans le secteur le 22 mai 1942.
Nous avons passé deux mois à la gestapo de Angers : interrogatoires, instructions, nous avons été condamnés à mort.
Puis nous avons été envoyés à Fresnes pour complément d'instruction, où nous avons passé douze mois. Nous avons à nouveau été condamnés à mort à Fresnes, plusieurs ont été exécutés, fusillés au Mont-Valérien à Suresnes (Louis RENAUD).
Le 8 juillet 1943 nous avons été tous regroupés dans une cellule et j'ai retrouvé tous mes camarades Joël LE TAC de Saint-Pabu, Yves LE TAC son frère, TURBAN, DEVOS de Saint-Brieuc, MORVAN de Saint-Brieuc, POCHE…
Après le secret j'avais été mis avec un nommé Pierre DE VAUMICOURT, un neveu au général LECLERC. Ils recevaient des colis des ….., Croix Rouge, des colis familiaux. Ils avaient tout, car ils étaient des militaires. Mais nous, nous étions des soldats sans uniforme, nous étions des terroristes.
Je faisais partie de trois réseaux, mon arrestation était inévitable, cela ne faisait aucun doute, c'est avec le premier réseau que j'ai été arrêté.
J'étais en liaison avec Joël LE TAC qui avait été parachuté en France par Londres par l'intermédiaire du commandant THOMAS de Perros-Guirec qui était en liaison avec un nommé Paul GOUDERAS qui tenait un café devant l'église de Perros-Guirec.
La gestapo à Angers n'a pas été très tendre, il y avait des confrontations. Le mari de Madame WILTBORTS qui était docteur était parmi nous. J'ai monté un alibi valable, j'ai dit que ma fille était malade. Car la première question que m'a posé la gestapo :
- " vous avez le numéro 31AQAC du groupe " Georges France ", vous êtes inscrit à LARDRER ".
Voilà comment on m'a attrapé au départ, j'ai répondu :
- " je connais pas ce truc là ",
- " mais enfin vous connaissez le docteur WILTBORTS ",
- " bien sûr que je la connais puisque je l'ai contacté pour ma gosse qui avait une maladie de peau ".
Monsieur WILTBORTS était officier de marine en retraite, il était spécialisé dans les maladies de peau. Mais le docteur n'avait pas tout a fait dit cela, il a fallu que je le fasse revenir sur sa déposition, le soir dans la cellule avec Jean LIVINEC, un docteur qui était de Rennes j'ai réussi à faire passer un message au docteur WILTBORTS pour qu'il mette en concordance avec ce que j'avais dit. Pour qu'ils nous foutent la paix, parce que là on a dérouillé, il est revenu sur sa déposition et on m'a foutu un peu la paix.
Par la suite on m'a mis un mouton dans ma cellule un nommé PAGEOT de Saint-Brieuc qui fait partie aujourd'hui d'une équipe des vieilles bagnoles, ils ont même fait une virée au Canada.
DEVOS après notre retour en France m'a dit :
- " PAGEOT est revenu, il faut lui faire sa fête ",
je lui ai répondu :
- " pour moi la guerre est terminée, et moi exécuter quelqu'un ici, j'ai pas envie de retourner à Fresnes, si tu veux faire le boulot, tu as qu'à le faire toi-même ", pour ma part j'avais repris mon boulot à La Perrosienne.
Nous avons été dirigé de Fresnes vers le Struthof, un camp d'extermination, nous sommes arrivés le soir par le train en gare de Rothau, j'étais enchaîné avec Monsieur LEDEUF que j'avais connu en 1940 au cours de parachutages à L'Hermitage-Lorge, le réceptionniste du parachutage était Monsieur HELARY garagiste à La Clarté, qui demeurait juste en face de ma maison, il avait un frère qui travaillait au commissariat de Perros.
Nous étions aussi en liaison avec des gendarmes : " GUYOMARD et ANDRIEUX qui correspondaient avec la gendarmerie de Paimpol où se trouvait Madame LERMEUR dont le mari était en Angleterre, son radio était Monsieur LECOR de Paimpol que j'ai connu ensuite.
Le docteur LAVOUE de Dinard est tombé dans la gare de Rothau, bien que je sois enchaîné avec LETEUF, je suis allé le secourir, je l'ai relevé et là un Allemand nommé Hermann STRAUSS m'a foutu un coup de pied dans le derrière, en me retournant j'ai eu un coup de crosse de mitraillette dans la bouche et quatre dents en l'air.
Ca été m'a réception au Struhtof.
J'avais déjà mon compte, mais c'est un détail à côté du reste. Nous avons été rassemblés et on nous a dit :
- " ici on rentre par la porte et on sort par la cheminée ".
Voilà le casse croûte en arrivant car nous avons subi des sévices abominables.
Le premier convoi de français qui est arrivé le 9 juillet 1943, cela a été terrible, nous avons du porter des pierres du ravin pour faire les marches du camp, dans la pluie, dans la boue, nous avions les chiens derrière et les kapos de chaque côté, beaucoup sont morts durant cette journée, cela a été terrible.
Nous sommes descendu au crématoire, mis à poil et nous devions monter sur un tabouret les bras tendus pour regarder si rien avait été caché dans l'orifice, ils regardaient aussi si nous avions des dents en or, à chaque fois qu'il fallait monter sur le tabouret il s'en suivait un coup de nerf de bœuf qui vous faisait plonger en avant de dix mètres, et lorsqu'il fallait remonter pour la visite de l'orifice nous recevions deux coups en travers, ils nous dessinaient ainsi la croix de Lorraine :
" à toi qui est gaulliste, voilà comment on dessine ! ".
Après cela nous étions rasés partout, passés ensuite à l'acide picrique contre les poux, puis l'habillement nous était attribué, c'étaient de vieux frusques qui avaient été volés dans les magasins pillés aux juifs, et une paire de claques en bois en guise de godasses.
Nous avons été mis dans le bloc n°9 pendant un mois puis transférés au bloc numéro 13 où il y avait auparavant une soixantaine de femmes qui avaient été gazées, nous les avons remplacées, ce bloc était entouré de barbelés à l'intérieur du camp, nous formions une compagnie disciplinaire dans un camp disciplinaire, nous avons été " soignés ".
LE CAMP DU STRUHTOF
LE 9 JUILLET 1943
Le docteur LAVOUE de Dinard est tombé dans la gare de Rothau, bien que je sois enchaîné avec LETEUF, je suis allé le secourir, je l'ai relevé et là un Allemand nommé Hermann STRAUSS m'a foutu un coup de pied dans le derrière, en me retournant j'ai eu un coup de crosse de mitraillette dans la bouche et quatre dents en l'air.
Ca été m'a réception au Struhtof.
J'avais déjà mon compte, mais c'est un détail à côté du reste. Nous avons été rassemblés et on nous a dit :
- " ici on rentre par la porte et on sort par la cheminée ".
Voilà le casse croûte en arrivant car nous avons subi des sévices abominables.
Le premier convoi de français qui est arrivé le 9 juillet 1943, cela a été terrible, nous avons du porter des pierres du ravin pour faire les marches du camp, dans la pluie, dans la boue, nous avions les chiens derrière et les kapos de chaque côté, beaucoup sont morts durant cette journée, cela a été terrible.
Nous sommes descendu au crématoire, mis à poil et nous devions monter sur un tabouret les bras tendus pour regarder si rien avait été caché dans l'orifice, ils regardaient aussi si nous avions des dents en or, à chaque fois qu'il fallait monter sur le tabouret il s'en suivait un coup de nerf de bœuf qui vous faisait plonger en avant de dix mètres, et lorsqu'il fallait remonter pour la visite de l'orifice nous recevions deux coups en travers, ils nous dessinaient ainsi la croix de Lorraine :
" à toi qui est gaulliste, voilà comment on dessine ! ".
Après cela nous étions rasés partout, passés ensuite à l'acide picrique contre les poux, puis l'habillement nous était attribué, c'étaient de vieux frusques qui avaient été volés dans les magasins pillés aux juifs, et une paire de claques en bois en guise de godasses.
Nous avons été mis dans le bloc n°9 pendant un mois puis transférés au bloc numéro 13 où il y avait auparavant une soixantaine de femmes qui avaient été gazées, nous les avons remplacées, ce bloc était entouré de barbelés à l'intérieur du camp, nous formions une compagnie disciplinaire dans un camp disciplinaire, nous avons été " soignés ".
J'ai connu au camp le docteur Léon BOUTBIEN de Paimpol, nous avons passé ensemble des moments terribles, je lui ai dit :
- " Léon, je crois, ce coup-ci que les carottes sont cuites ",
il me répondit :
- " je voulais te le dire ",
lui répondant :
- " t'as pas à me le dire, nous sommes dans le sas ".
Nous sommes restés là jusqu'au mois de novembre 1943 au cours duquel est arrivé un nouveau convoi de français.
Sur 160 que nous étions arrivés, nous n'étions plus que 50 survivants, le vide avait été fait en vitesse.
Dans ce convoi il y avait un nommé Joseph POITEVIN qui était de Perros-Guirec, charpentier de marine au Linkin, marié à une perrosienne.
A cette époque les barbelés ont été enlevés autour de notre bloc, il y a eu une amélioration pour la cinquantaine de survivants, alors nous avons pu avoir des contacts avec d'autres prisonniers : des hollandais, des belges, des luxembourgeois et des anciens de Dachau.
Nous étions dirigés par des droits communs qui étaient les maîtres de la situation dans le camp, mais plus tard les politiques ont réussi à prendre le dessus sur ces droits communs en en exterminant quelques uns.
Le Parti Communiste Français qui avait un grand responsable avec qui je suis encore en correspondance aujourd'hui écrit actuellement un livre.
Mademoiselle LABBE habite Perros-Guirec elle s'appelle Madame THRUE.
Moi j'ai eu beaucoup de chance au Struhtof.
Le soir très tard, avec le docteur BOUTBIEN nous soignions les blessés et nous procédions au nettoyage des toilettes.
Le nouveau chef de bloc était un garçon de café de Berlin qui était un objecteur de conscience un nommé MILWATIN, il nous donnait une gamelle de soupe quand nous avions fini notre travail vers les 20 - 21 heures, c'est cette gamelle qui nous a sauvé la vie, nous avions cela en supplément des autres.
Je lui ai dit :
" tu me procures un bout de bois et un couteau et je t'offrirai quelque chose pour ton Noël ", et c'est ainsi que je lui ai fabriqué la goélette " Pierre Loti " sur laquelle mon père était pêcheur en Islande, je connaissais très bien ce bateau, alors que je travaillais sur cette maquette, est venu à passer le commandant du camp, il m'a dit :
" qu'est-ce que tu fais là ? ",
je lui ai répondu : " je fais pour le Noël à Emile le chef de bloc ", " non pour moi il a répondu ".
J'ai terminé le bateau et l'ai offert à KRAMER au bourreau de Bergen-Belsen, le fameux KRAMER, de là j'ai été convoqué par KRAMER, qui avait sa villa à l'extérieur du camp. Il m'a demandé si je pouvais lui faire un bateau de sur un tableau de la bataille de Malte qu'il avait chez lui.
- " si on me donne un local, des outils et à manger, je ferai n'importe quoi ", et c'est ainsi que j'ai fabriqué la caravelle de Malte, que j'ai bien peaufiné car j'avais le temps, je n'étais pas pressé.
Par la suite j'ai fabriqué des bateaux à presque tous les SS pour leurs gosses, et je les ai mis tout doucement dans ma poche, ensuite j'ai été nommé chef d'atelier de menuiserie, chargé de l'entretien du camp avec une dizaine de compagnons dont j'ai tenté de sauver la vie, c'est ainsi que j'ai sauvé ma vie, une chance inouïe.
Le responsable de tous les kommandos de travail était un nommé FOURMADON qui avait été arrêté après l'attentat du Reichstag en 1934, c'était un charmant garçon, communiste qui avait déjà une dizaine d'années de camp, il était en contact avec le maquis de Donon.
Quand le général DELESTRAINT est arrivé au camp, nous nous sommes organisés en groupes, les communistes avaient déjà leur organisation, j'ai fait un travail de solidarité avec eux, bien que je ne fus pas communiste.
J'étais en liaison avec des civils qui venaient travailler aux carrières, je cassais quelquefois la croûte avec eux, les SS faisaient semblant de ne pas me voir car ils ne voulaient pas se mouiller étant donné qu'ils m'avaient fait travailler pour eux alors qu'ils n'en avaient pas le droit.
Lors de l'évacuation du camp, DELESTRAINT avait formé des groupes, j'étais sous les ordres de Joël LE TAC, nous étions vingt par groupe, pour tenter une évasion, nous étions en liaison avec le maquis de Donon par l'intermédiaire de mon chef d'atelier.
Vers la fin une purge du camp a été effectuée, des groupes de 3 à 4000 hommes étaient formés, celui qui était pris était emmené dans les bois où avaient été préparées des tranchées pour y mettre tout le monde.
LE CAMP DE DACHAU
LE 4 SEPTEMBRE 1944
Nous avons quitté le Struhtof le 4 septembre 1944, j'était dans un convoi, un responsable qui m'a embarqué m'a dit :
- " il faut un responsable ",
- " un responsable de quoi ? moi si je trouve un trou, tu comprends bien qu'il n'y aura plus de responsable ", il y avait des soldats sur le bord de la route, nous avons descendu jusqu'à Rothau pour prendre le train, il y en avait aussi dans les bois. On ne descend pas un convoi de 3 à 4000 bonhommes sans surveillance, ils avaient des chiens, il était donc impossible de s'évader.
A Rothau nous avons embarqué en direction de Dachau.
A Stuttgart notre convoi a été bombardé par l'aviation anglaise, un bombardement abominable, nous avons " dérouillé ", mais sans faire trop de dégâts chez nous.
Deux jours après nous sommes arrivés à Dachau, de Dachau nous avons été dirigés sur Alach, à l'usine BMW qui était entre Munich et Dachau, nous avons été mis en quarantaine pendant trois mois, dans la flotte, sans couchette, dépourvu de tout, c'était terrible, on couchait dans la flotte.
Il y en a un qui pourrait vous raconter cela c'est Jean PRIGENT de La Clarté, je sais que son frère a été pendu, il est arrivé au mois de juillet 1944 au Struhtof.
De là nous sommes allés dans un camp de travail, je me suis trouvé avec des anciens du Struhtof, alors j'ai été flanqué tout de suite dans un kommando de travail autour du camp, me voilà parti à nouveau comme chef de chantier.
J'ai récupéré trois fois dans cette aventure, DOLVEN à Fresnes, nous avons été vraiment sonnés et puis on avait rien à manger, un trognon de choux en guise de repas.
Après le secret j'avais été mis avec Pierre DE VAUMICOURT, un neveu du général LECLERC, comme tous les militaires il recevait des colis de la Croix Rouge et de la famille. Nous en tant que soldats sans uniformes nous n'avions droit à rien.
En trois mois ils m'ont retapé, et quand je suis arrivé au Struhtof j'étais prêt à accepter la séance, j'avais bien récupéré et j'ai pu accepter mieux que les autres.
J'ai été ramené à zéro au Struhtof, mais grâce à mon bateau j'ai pu récupérer.
Quand je suis arrivé à Dachau j'étais costaud, j'avais des ressources.
Nous avons eu un bombardement sévère le 26 décembre 1944, les anglais sont venus dans la nuit, les américains dans la journée, je suis allé me mettre à l'abri dans les égouts, si une bombe tombait dessus nous étions tous morts. Les égouts étaient relativement grands de 0.8 m à 1 m de diamètre.
La crainte que nous avions était d'être blessé, car une blessure sans soin cela signifiait des souffrances atroces. Tandis que si vous étiez tués sur le coup aucune souffrance.
LA FIN DU CAUCHEMAR
LE 29 AVRIL 1945
Vers la mi avril 1945, le camp a commencé à être évacué, des groupes de 3 à 4 000 ont été formés à l'aveuglette, ils étaient emmenés dans les bois où ils préparaient des tranchées, ils étaient exécutés à la mitraillette puis ensevelis dans ces tranchées. Lorsque j'ai vu qu'il n'y avait aucune discrimination dans le choix des victimes j'ai compris qu'il était temps de partir.
J'en ai parlé à Louis GAILLOT, un architecte de La Rochelle et lui ai dit :
" moi je fou le camp ",
J'ai prévenu aussi le docteur BOUTBIEN, c'était à la fin du mois d'avril, nous sommes partis à cinq et nous avons rejoint les unités du général LECLERC au sud de Munich, nous avons trouvé un autobus sur la route et avons été reçu au QG des officiers, puis nous avons été emmenés dans une villa où nous sommes restés avec eux pour fêter la quille le 8 mai 1945.
Je suis rentré chez moi le 13 mai 1945.